Un âne et un mouton, se croisant en chemin,
discutaient économie, le sujet à la mode.
“Je suis un ignorant”, se lamentait le roussin,
“Je suis très bien informé; je lis les journaux.
Croyez-moi dit le mouton, sans austérité,
point de salut; il nous faut nous sacrifier.
Mon berger lui-même a renvoyé dix agneaux."
"Ton berger ne devrait-il pas te conduire vers l'Eden?
Lui obéis-tu toujours quoi qu'il demande?
Pourquoi permets-tu de tondre toute ta laine?
Ses chiens, pour te garder, reçoivent prébende!"
"Imbécile, tu es bien bête de penser ainsi,"
rétorqua le broutard. "N'ai-je point pâturage,
couche confortable, femelle et beaux paysages?
Qu'ai-je faire de liberté et de suprématie?"
L’illettré semblait bien au fait du sort des ovins.
Le savant au contraire fut fort ébaubi
d'apercevoir plus loin le pasteur et le lupin
deviser ensemble et chercher un compromis.
Alors, un âne qui doute est-il insensé?
Aussi, un mouton crédule est-il malheureux?
Mais ce que je tiens pour certain, c'est qu'aucun d'eux,
du loup, n'aura l’idée de se débarrasser.
Et nous, qui ne sommes ni ânes ni moutons,
Qui savons lire, penser, agir et partager,
Qui voyons les loups et leur appétit glouton,
Saurons-nous les tuer et chasser le berger?
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