L'exceptionnel rassemblement populaire du 18 mars à l'appel du Front
de Gauche, plus de 120.000 participants, aura nécessairement des conséquences au PS.
Même si les sondages refusent de positionner le Front de Gauche en
candidat crédible du second tour des Présidentielles 2012, le PS va
devoir infléchir sa stratégie de campagne pour éviter le désastre.
L'incompréhension de nombreux commentateurs politiques et médiatiques
surpris par la longue procession qui s'est étendue de Nation à Bastille
témoigne d'un décalage de plus en plus fragile entre la réalité
concrète de cette poussée populaire, et l'image aseptisée qu'essaient de
brosser les acteurs du paysage politico-médiatique.
Pour preuves, le réflexe de panique qui s'empare ce matin des
journalistes et des politiques suite au succès populaire de la re-prise
de la Bastille. Même M. Valls envisage que FH soit devancé par JL
Mélenchon au premier tour! Après C. Barbier, S. Raffy, Dénarié et bien
d'autres, A. Duhamel promet une "catastrophe" s'il est élu! B. Tapie
ressort de la boite dorée dans laquelle il se terrait, de peur sans
doute de représailles populaires si le Front de Gauche poursuit son
ascension! JP. Raffarin salue le succès de la Bastille tout en
soulignant le caractère "anti-européen" du Front de Gauche! F. Hollande
"change" de stratégie et milite pour le vote "efficace" (sic!) après que
le vote utile ait échoué! S. Royal prend sa revanche de 2007 sur ses
"camarades" en étant la première dignitaire socialiste de haut rang à
reconnaitre le succès de JL Mélenchon qu'elle considère comme son allié!
Même ce dernier finit par se méfier de sa propension légitime à
critiquer son "concurrent" de gauche, dont il sait bien l'utilité.
Comment imaginer que F. Hollande reste arc-bouté à ses "propositions"
aux deux tours? Il sent bien que le temps qui le sépare du 22 avril
émousse chaque jour un peu plus sa crédibilité. Son staff de campagne ne
pourra lui cacher plus longtemps le risque que les "courbes" du PS et
du Front de Gauche se croisent tôt ou tard. Cas de figure rendu possible
par les efforts surhumains que produisent les caciques de l'UMP pour
affaiblir le PS en flattant les mérites de JL Mélenchon. Cela peut-il se
produire avant le premier tour? Entre les deux? Plus tard?
Quoiqu'il en soit, cette situation ne s'improviserait pas; la partie
est trop serrée, les signes trop manifestes. Mais, quelles sont les
options du PS?
Reconsidérer leur programme? Le seul recours en ce domaine serait de
rapprocher les 60 propositions de F. Hollande du programme PS qu'il
s'était engagé à défendre en participant aux primaires, mais dont il
s'est rapidement distancé. A manier avec des pincettes. Le précédent de
l'impôt "à 75%" a montré ses limites, en renforçant la crédibilité du
Front de Gauche sur sa politique fiscale, et en provocant l'ire très
médiatisée de footballeurs concernés. Par ailleurs, ce pourrait être
interprété non seulement comme l'aveu d'un projet mal ficelé, mais aussi
comme le désaveu évident d'une stratégie jusque là "indépendante des
circonstances".
Envisager des alliances? Ils ont déjà siphonné EELV, JP
Chevènement... le paysage de proximité est déjà "rassemblé". Restent les
voisins de campagne.
Le rapprochement avec le Front de Gauche, lui-même constitué de
forces diverses de gauches radicales, mais pas extrêmes, serait donc
devenu idéologiquement envisageable pour les dirigeants du PS. Pour le
Front de Gauche, ce pourrait être envisagé comme le retour dans la
famille d'un oncle "parvenu" mais finalement ému par l'appel des siens à
les rejoindre. Sauf que ce ne pourrait survenir sans de sévères
concessions du PS au programme du FdG, et qu'il est probable qu'au
détour des compromis nécessaires, l'un perde sa crédibilité populaire et
l'autre le soutien médiatique. Décidément, leurs différences
idéologiques sont bien trop importantes pour envisager un tel destin à
ce moment avancé de la campagne. Car au fond, l'ascension du Front de
Gauche n'est due qu'à la droitisation du PS depuis la fin des années 80.
En poursuivant sa trajectoire libérale, le PS ne propose plus qu'une
alternance molle au Sarkozysme, et rompt le fil idéologique qui retenait
récemment encore les intentions de vote.
Reste le Modem. P. Moscovici a déjà envisagé une ouverture vers le
centre, avant de se raviser. Peut-être était-ce trop tôt, mais la
question continue de se poser. F. Bayrou stagne dans les sondages,
manque cruellement d'un parti mais également d'idées neuves. En
revanche, il est tellement difficile de distinguer leurs différences
qu'une alliance du PS et du Modem pourrait agglomérer leurs électeurs
autour de l'éternel et partagé "tout sauf Sarko". Ce ne serait un
revirement pour aucun des deux partis, mais en effet peut-être pour
chacun l'unique chance de former un gouvernement. Autres avantages, ils
pourraient arguer du risque "Sarko bis" pour annoncer à la dernière
minute leur alliance avant le premier tour, si les sondages finissaient
de les y contraindre; et il y a fort à parier que cette stratégie aurait
l'heur de plaire aux "mains invisibles du marché", et d'entrainer par
conséquent le soutien des médias dominants. Le risque resterait tout de
même, dans cet ultime effort à préserver l'accès aux ors du pouvoir,
d'ouvrir par là-même un boulevard au Front de Gauche, renforcé soudain
dans son rôle de "seul programme anti-libéral crédible", et dans lequel
s’engouffreraient les derniers fidèles de la "gauche" du PS. Autres
interrogations: qu'adviendrait-il de cette alliance, éventuellement
victorieuse aux présidentielles, face aux élections législatives? F.
Bayrou pourrait-il mener un gouvernement PS/Modem? Devraient-ils former
un gouvernement d'"ouverture" conforme à la composition du parlement?
Autant de questions qui doivent également tarauder les "investis"
d'EELV...
Comme on doit s'agiter en ce moment dans l'hôtel particulier de l'avenue de Ségur! Tempête de neurones sous les crânes à tous les étages! Idées bienvenues! Pour paraphraser leur adversaire commun, j'ajouterais en leur nom: "JE vous demande de NOUS aider!"
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