mercredi 3 avril 2013

Ah! Ca ira, ça ira, ça ira...!

Ils ont tout, mais en veulent plus. Leur fonction publique ou élective semble avoir pour unique objet de servir leurs insatiables besoins de pouvoir et d'argent. Ils sont de formidables acteurs, capables de mentir aussi bien que d'imposer aux autres des règles qu'ils défient chaque jour. Ils occupent des postes éminents depuis lesquels ils usent, avec une adresse inouïe, des privilèges dont ils distribuent les miettes auprès d'obligés qui assurent leur survie. Ils excellent dans la dénonciation de scandales qu'ils entretiennent méticuleusement. Ils sont les complices d'adversaires politiques qu'ils feignent parfois de combattre devant des caméras complaisantes. Leur réussite se mesure à leur capacité d'échapper aux poursuites, leur échec à la médiatisation de leurs vicissitudes. Ils sont nombreux, très nombreux, au sein de leur caste élitiste, celle du pouvoir.
Ils sont hommes politiques, lobbyistes, financiers, industriels, communicants, hommes de l'ombre, avocats, "journalistes" et bien d'autres. La Justice ne les effraie pas: ils l'ont amputée, dépouillée, noyée dans des lois inutiles. Les grands médias ne les effraient pas: ils représentent l'intérêt de leurs pairs.


Ils n'ont qu'un seul véritable adversaire: la presse d'investigation indépendante. Nommément, selon Wikipédia: Le Canard Enchaîné, Backchich et Médiapart. Auxquels j'ajouterai Wikileaks, avec les déboires que cela procure à son fondateur. Cela fait peu de contrepouvoirs. De plus, ils sont, à part le Canard, peu accessibles. Tous les coups tordus sont non seulement permis, mais encouragés par leur système de "valeurs". Les yeux et les oreilles de l'opinion publique sont soigneusement détournés par la presse "utile", celle dont l'intérêt commun, du Figaro à Marianne, des Echos  au Monde, de TF1 à M6, est d'entretenir un système qui entrave toute tentative de manifestation de la vérité.

Pour une affaire "Cahuzac", combien de fraudes fiscales soigneusement ignorées des médias dominants? Pour une condamnation du RPR pour "emplois fictifs", combien de malversations commises par les partis de l'époque? Pour la condamnation de quelques sous-fifres dans des marchés truqués, combien de "promotions" pour services rendus?

Souvenons-nous du tollé général que provoqua la divulgation publique de milliers d'informations secrètes par Wikileaks. La caste au pouvoir ne souffre pas la transparence. Les coups de projecteur sur l'élite ne peuvent qu'en souligner la munificence. Que la lumière atteigne l'un des leurs et ses turpitudes, la meute hurle soudain contre le renégat, veillant simultanément à couvrir ses arrières.

Pourtant, les médias et l'UMPS avaient très bien soutenu, pendant plusieurs mois, ce ministre "brillant, compétent, capable", contre un Médiapart isolé par les éditocrates appelés à faire front par un système médiatique aux ordres.

 
En ce lendemain d'aveux pitoyables d'un des hommes les plus puissants de France jusqu'il y a quelques jours, des voix s'élèvent encore ce matin, qui ne sont indignées que par les méthodes pernicieuses de Médiapart, et font l'éloge des compétences de cet ancien ministre "au-dessus de la moyenne", faisant écho aux critiques plus que mesurées dont l'opposition nous étonnait. La puissance de cette élite est infinie. Elle retombera vite sur ses pattes, à moins que...

Et si cette "affaire Cahuzac" n'en était qu'à son début? Si la justice découvrait un réseau de fraude fiscale, de blanchiment d'argent? Si le montant "avoué" était bien inférieur au réel? Si d'autres hommes politiques étaient éclaboussés? Si la justice s'intéressait aux conflits d'intérêt de Cahuzac dans le cadre de ses activités précédentes? Si, au passage, l'étonnante mansuétude de l'opposition, entrainait d'autres personnalités?

Car l'embarras général dans le microcosme politique est palpable. Les réactions défensives de Ayrault, Moscovici, et Hollande ce midi ne présagent rien de bon. Laurent Fabius lui-même, pourtant politiquement moins exposé, mais financièrement très au fait de l'optimisation fiscale, choisit, entre être berné et mentir, le ridicule de la naïveté. Passer pour un con ou pour un salopard, ils ont choisi, à l'insu de leur plein gré!

Mais comment croire une seconde leur sentiment de trahison? Ils savaient, nécessairement, et nous mentent à leur tour. La liste des Français ayant un compte bancaire à l'UBS en Suisse est passée dans les mains d'E. Woerth, ancien ministre du budget, qui a publiquement annoncé qu'il utiliserait cette liste. Et pourquoi les derniers ministres du budget, en charge de la fraude fiscale, n'ont-ils pas poursuivi Cahuzac dont le compte secret en Suisse fut découvert par l'administration fiscale en 2008? Nous assistons en direct au naufrage d'un gouvernement élu par la gauche au service exclusif de l'oligarchie. Les quelques ministres intègres vont devoir se désolidariser d'une façon ou d'une autre de ce gouvernement corrompu. Les autres devront partir sous la honte et les quolibets, avant d'éventuelles poursuites judiciaires.

La déroute se traduit par ce qui n'est pas dit. Pour l'instant, Cahuzac n'est accusé que de mensonges, ou d'outrage à la République. Qui va dénoncer le fraudeur fiscal? L'abus de pouvoir? Les conflits d'intérêt?

Pour l'instant, il ne s'agit que d'une faute individuelle, un comportement inqualifiable mais personnel, et donc d'un cas isolé qui n'atteint pas le reste des personnalités politiques. Ben voyons! Et Guérini? Et le PS du Nord Pas de Calais? Et Woerth? Et Sarkozy? Balkany? Cela fait de bien trop nombreux cas isolés pour ne pas cacher un système... Qui osera le dénoncer?

Pour l'instant, Cahuzac, présumé innocent, avoue un crime. Est-il complet? Que nous cache-t-il? Que protège-t-il? Et qui osera nommer sa traîtrise par laquelle le gouvernement auquel il appartenait perdra bientôt le pouvoir au profit de l'extrême droite? Qui peut mesurer le nombre de ses victimes que son forfait a déjà faites et entrainera à l'avenir? Car la pauvreté et le chômage sont une conséquence directe de la déréglementation, des 80 milliards/an d'évasions fiscales, et d'une fiscalité odieuse. Cette crapule est un beau salopard.

Pour l'instant, tout va bien. Ah, ça ira, ça ira, ça ira....


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