Partout où le Front de Gauche tient meeting, c'est la folie! Assistance nombreuse et fervente, impliquée, écoutante, le public sort souriant et instruit de ces réunions citoyennes, transformé en colporteurs d'un programme partagé, plus respectueux de la vie que des marchés financiers. A ceci, deux raisons:
La première est que les idées qu'il défend renverse les préjugés communément admis par l'économie de marché vaillamment imposée par les médias dominants, télévisions en tête. Ceci conduit, comme pour le référendum sur le Traité de Constitution Européenne, à contourner l'obstacle en activant la dissémination populaire, en contrariant la propagande par une pédagogie directe, résumée par le slogan: "les médias, c'est nous". C'est ce mouvement grandissant de militants en mission, couronné par l'immense succès de la marche pour une sixième république à la Bastille, qui a rompu les digues élevées par les chiens de garde politiques et médiatiques du capitalisme. Le 18 mars 2012, le Front de Gauche pesait enfin sur la campagne électorale avec l'engouement populaire démontré par l'image et le bruit diffusés cette fois sur toutes les chaines.
La seconde est qu'il s'agit d'un mouvement politique certes minoritaire, contestataire, mais conscient, volontaire et par nature méfiant à l'encontre de l'élite. Trop longtemps trahie par les dirigeants socialistes, cette gauche là s'implique avant tout pour s'ériger en gardienne de "l'humain d'abord", contre ceux qui pourraient être tentés de se l'approprier. C'est aussi l'exercice difficile auquel le talent de JL Mélenchon est confronté: gagner chaque jour un peu plus la confiance des plus sceptiques des citoyens, auparavant réfugiés dans une abstention écœurée. Il est beaucoup plus difficile de rassembler dans un projet commun ces militants d'origines aussi diverses que communistes, trotskistes, décroissants, écologistes, libertaires, altermondialistes, féministes, antiracistes... toujours prêts à croiser le fer de leurs identités idéologiques, que les électeurs peu mobilisés mais majoritaires des partis classiques, soulagés de leurs responsabilités citoyennes par un consentement à l'autorité et à la corruption qui en découle nécessairement.
La violence de la guerre économique déployée contre l'Europe a atteint un tel niveau que cette minorité de contestataires a résolu de non seulement unir leurs forces, mais aussi d'entrainer avec eux tous ceux dont la colère grandit, ceux, très nombreux, qui ne supportent plus qu'une minorité dont ils ne font pas partie, accable les plus fragiles dont ils se sentent solidaires. En d'autres termes, le Front de Gauche réunit contre le capitalisme les "classes moyennes" soudainement sensibilisées et concernées par les difficultés des précaires, des pauvres et des exclus.
C'est sans doute ce qui le différencie le mieux de la sociale-démocratie qu'est devenu le PS. L'électorat PS, accablé par les dérives droitières du sarkozisme, mais attiré par celui du centre droit, est mobilisé par la défaite du président en exercice, qu'ils nomment "candidat-sortant", au détriment de mesures sociales qu'ils jugent "irréalistes", trop ambitieuses, incompatibles avec la situation de crise et les moyens financiers menacés par la dette publique. Il serait pertinent de s'interroger sur les motivations de ces dirigeants "de gauche" qui mobilisent des snipers satellites (Montebourg, Collomb, Duflot, Cohn-Bendit, Placé, Cahuzac, Fabius...) pour convaincre leurs électeurs que l'utopie du Front de Gauche est "nostalgique, infaisable, soviétique, rétrograde, velléitaire..." tout en préservant le FN de toute critique. On découvrirait sans doute à la fois les groupes de pression financiers influant la direction du PS, l'importance du FN dans le verrouillage du vote PS, et par conséquent la fragilité de ce parti en proie au doute.
C'est ainsi que le PS, enfermé dans une stratégie attentiste, prend le risque de laisser au seul Front de Gauche le monopole de la lutte contre les marchés, contre le grand patronat, contre les politiques d'austérité, contre le déni-démocratique européen, contre la crise écologique induite par le capitalisme, contre l'injustice fiscale, contre l'allongement de l'âge de la retraite, contre l'allongement du temps de travail, contre la monarchie républicaine de la cinquième république, contre les contrats précaires... et pour les hausses de salaires! Ça ressemble fort à l'abandon des "principes essentiels" du socialisme et à l'adoubement d'intérêts libéraux dont ses concurrents de droite ont eux-mêmes du mal à s'extraire en période électorale...
Les élections du 22 avril détermineront qui, des résistants en guerre contre l'agression invisible et silencieuse des marchés ou des anti-sarkosistes gonflés aux stéroïdes du bi-partisme, vont représenter le premier parti de Gauche en 2012. Et si l'on peut enfin poser cette question sans que ni les médias dominants ni les fabricants de sondages ne se moquent du Front de Gauche, c'est que tout le pays, partisan ou non de ses idées, est atteint de "mélenshowlie"! Certains l'espèrent, d'autres la redoutent, mais plus personne ne peut la nier sans être couvert de ridicule, comme les pauvres Collomb et Parisot!
Pour ma part, qui considérais le monde divisé entre "les vivants, les morts et ceux qui vont sur la mer", je ferai au soir du 22 avril la part entre ceux qui auront voté Mélenchon et ceux qui auront voté pour le capitalisme libéral et austère.
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